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L’enfant perdue, L’amie prodigieuse IV, Elena Ferrante (chronique)

L’enfant perdue (de son titre original Storia della bambina perduta) est le quatrième et dernier tome de la célèbre saga L’amie prodigieuse (L’amica geniale). Son auteur, Elena Ferrante, nous livre la maturité et la vieillesse de ses personnages, Lila et Elena. Il est sorti en France aux éditions Gallimard en 2018.

Il est difficile de définir le ton si particulier d’Elena Ferrante. Lenteur presque insoutenable du temps qui passe, les pages de L’enfant perdue se tournent comme les années filent. Avec une telle langueur que ce qui semble infiniment long ne l’est pas tant que cela, qu’on se retrouve au bout de l’histoire avec le sentiment que le livre est passé trop vite. La lenteur de la narration était un leurre. Les personnages eux-mêmes semblent avoir été surpris par cette lenteur, et se réveiller à la fin du récit en réalisant brutalement qu’ils sont vieux.

Le récit est lent, car extrêmement détaillé. Il y a cette volonté de tout décortiquer, et en particulier de disséquer les intentions cachées. « Regarde dans ces déchirures et tu verras la nébuleuse des bonnes intentions se mélanger à celle des mauvaises. » Elena Ferrante donne à ses nombreux personnages un réalisme incroyable, tant elle les rend complexes. Elle gratte le vernis des sentiments premiers, des émotions affichées, pour mettre en lumière ce qui s’y cache. Elle n’épargne aucun personnage, pas même l’héroïne et narratrice, et révèle avec brio la fugacité des sentiments et des relations.

Roman psychologique, roman social également, que le dernier tome de cette saga, ancré dans son époque et en montrant l’évolution politique. Le quartier change, les personnages clés vieillissent et le monde qui les entoure commence à ne plus être le leur. La relation Elena/Lina est plus que jamais au cœur du récit, entre rapprochements et éloignements. Les deux femmes sont devenues mères, la maturité augure pour l’une la stabilité, pour l’autre l’instabilité ; le changement d’une part, la stagnation de l’autre. Pour Elena, la figure maternelle est plus présente que jamais. La mère, jadis crainte, devient haïe, puis retrouvée, aimée, recherchée, et finalement regrettée, imitée. En somme, un dernier tome en apothéose, difficile et prenant, reflet de Naples et de l’Italie sur six décennies, mais surtout reflet de la vie. Magistral, forcément, et à lire en italien de préférence.

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